La Nation Bénin...
Le
diagnostic en matière de paludisme laisse encore perplexe en dépit des actions
dans le monde. Le fardeau est encore lourd, mais le vaccin antipaludique et les
mesures existentielles donnent de bonnes raisons d’espérer.
Le
paludisme sévit sans pitié: toutes les 30 secondes, un enfant en meurt dans le
monde. Cinq cents millions de décès lui sont imputables chaque année. L’Afrique
est le continent le plus touché avec quatre-vingt-dix pour cent de ceux qui en
meurent.
Le continent africain enregistre deux cent quarante-sept millions de cas de paludisme et six cent soixante-dix-neuf mille décès liés à la maladie, soit près de 95 % des cas dans le monde et 96 % des décès liés à cette maladie en 2021. Parmi les personnes décédées, 77 % étaient des enfants de moins de 5 ans, dont la majorité vivait en Afrique.
Le
Bénin ne fait pas exception à la règle. Le paludisme est la première cause de
décès chez les enfants de moins de cinq ans dans le pays. Plus de 4,7 millions
de cas de paludisme et dix mille décès avaient été signalés en 2020 dans le
pays parmi les 12,1 millions d'habitants, principalement chez les enfants de
moins de cinq ans, selon les données de l’Oms.
Le
bilan de ces deux dernières années au Bénin n’est pas moins lourd. Sur dix
personnes décédées du paludisme en 2022, huit étaient des enfants. En 2023, sur
cent enfants âgés de moins de cinq ans, quarante avaient fait le paludisme
avant la fin de l’année. Ces données ont été évoquées par Benjamin Hounkpatin,
ministre de la Santé, à l’occasion de la Journée mondiale contre le paludisme
2024.
L’Unicef
renseigne que le paludisme est à l’origine d’environ un décès d’enfant sur
cinq. Responsable de l’anémie chez les enfants, la maladie contribue à
l’insuffisance pondérale à la naissance, l’un des principaux facteurs de
mortalité infantile.
Ses
conséquences ne se limitent pas seulement au plan sanitaire. Le paludisme a
également des répercussions économiques, ralentissant la croissance et le
développement économique et perpétuant le cercle vicieux de la pauvreté.
Tout n’est pas perdu
Si l’on s’en tient aux efforts des gouvernements et des institutions internationales, l’on peut garder l’espoir que face au paludisme, tout n’est pas encore perdu. Des solutions et traitements utiles existent. Pendant longtemps, les pays ont prôné la moustiquaire imprégnée d’insecticide contre le paludisme, quoique tous les ménages tardent à l’adopter. Cette mesure demeure d’actualité. Elle permet de réduire de 20 % la mortalité infantile. L’accès rapide à un traitement efficace permet également de réduire davantage le taux de mortalité.
Le
dispositif de prévention du paludisme comprend des vaccinations systématiques.
C’est justement à ce niveau que se positionnent de plus en plus certains pays
africains, y compris le Bénin.
L’arrivée
au Bénin le 15 janvier 2023, de deux cent quinze mille neuf cent doses de
vaccins antipaludiques RTS,S recommandés par l'Oms et achetés par l'Unicef avec
le soutien de Gavi, marque une étape importante vers une vaccination plus large
contre cette maladie, l’une des plus mortelles pour les enfants de 0 à 2 ans
sur le continent.
Le
Bénin devient le quatrième pays à recevoir ces doses à la suite du Cameroun, de
la Sierra Leone et du Burkina Faso, marquant ainsi la fin de la phase pilote de
la vaccination antipaludique. Cette livraison marque le démarrage au Bénin de
l’administration du vaccin antipaludique aux enfants en quatre doses (6 mois, 7
mois, 9 mois et aux enfants de moins de 2 ans) dès le premier trimestre 2024
par l’intermédiaire du Programme Elargi de Vaccination soutenu par Gavi,
l’Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination.
«
La manifestation d'intérêt pour l'introduction de ce vaccin dans le programme
de vaccination de routine soumise par le gouvernement du Bénin a été approuvée
par Gavi, plaçant le Bénin parmi les neuf premiers pays agréés à bénéficier de
cette initiative cruciale, notamment le Burkina Faso, le Liberia et le Niger»,
lit-on dans un communiqué de l’Unicef.
L’expérience
du programme pilote de la vaccination a engrangé des succès dans les pays
l’ayant adopté. Là-dessus, l’Oms met en exergue les avancées au Ghana, au Kenya
et au Malawi. Avec plus de deux millions d’enfants ayant bénéficié du vaccin
antipaludique dans ces trois pays africains, le taux de mortalité toutes causes
confondues a chuté de 13 % chez les enfants en âge de recevoir le vaccin, et le
nombre de cas graves et d’hospitalisation liés au paludisme a considérablement
diminué.
Ces
avancées signifient qu’une mise en œuvre à grande échelle de la vaccination
antipaludique dans les régions endémiques pourrait enfin permettre de contrôler
la maladie et de sauver des dizaines de milliers de vies chaque année.
L’Organisation
mondiale de la santé y voit une révolution dans le monde. « Il s’agit d’une
nouvelle avancée révolutionnaire pour les vaccins antipaludiques, qui apporte
une lueur d’espoir alors que, dans le monde, tant d’enfants vulnérables
traversent des heures sombres. La livraison de vaccins antipaludiques à de
nouveaux pays d’Afrique offrira une protection vitale à des millions d’enfants
exposés au risque de paludisme », apprécie Tedros Adhanom Ghebreyesus,
directeur général de l’Oms.
Position proactive du gouvernement
L’introduction dudit vaccin contribuera au bien-être de tous. Cette conviction a motivé le lancement officiel de la vaccination antipaludique, le 25 avril dernier, couplé avec la célébration de la 17e édition de la Journée mondiale contre le paludisme.
«
Le Bénin agit rapidement pour utiliser ce vaccin, soulignant la position
proactive du gouvernement en matière de santé publique et s'alignant sur sa
politique de santé communautaire lancée en juin 2023 », souligne Brian Shukan,
ambassadeur des Etats-Unis près le Bénin.
Les
autorités béninoises assurent de l’efficacité du vaccin. « La découverte de ce
vaccin sûr et efficace est une avancée pour la science et la santé publique et
une grande avancée qui va préserver la vie à des dizaines de milliers d’enfants
dans notre pays. Je voudrais rassurer la population qu’elle pourra souffler
mais elle ne doit en aucun cas baisser la garde», indique Benjamin Hounkpatin,
ministre de la Santé.
Appréciant le vaccin, David Marlow, directeur exécutif de Gavi, évoque un remède historique contre le paludisme. « Nous sommes fiers que les parties prenantes qui forment notre Alliance, notamment les pays africains, aient pris la décision d’investir dans le vaccin antipaludique et d’en faire une priorité de santé publique, et que ce soutien ait permis la mise à disposition d’un nouvel outil capable de sauver la vie de milliers d’enfants chaque année. Nous sommes ravis de déployer ce vaccin historique dans le cadre de nos programmes et de travailler avec nos partenaires pour nous assurer qu’il est administré en parallèle d’autres mesures vitales».
Les
acteurs sanitaires au plus haut niveau sont unanimes sur le fait que le vaccin
antipaludique marque un tournant décisif dans le cadre de la lutte contre le
paludisme. Catherine Russell, directrice générale de l’Unicef, estime que ce
vaccin est une solution inégalée.
«
C’est un peu comme si nous faisions entrer notre meilleur joueur sur le
terrain. Cette étape tant attendue, franchie sous la conduite des dirigeants
africains, nous permet d’entrer dans une nouvelle ère en matière de vaccination
et de lutte contre le paludisme, avec l’espoir de sauver la vie de centaines de
milliers d’enfants chaque année », se réjouit-elle.
Il
faut souligner que les vaccins antipaludiques ne sont pas suffisants à eux
seuls pour éradiquer la maladie. Il est important de les combiner avec les
mesures de lutte contre le paludisme recommandées par l’Organisation mondiale
de la santé, qui contribuent à réduire les décès liés à la maladie depuis 2000.
Ces mesures incluent «l’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticide,
la pulvérisation intra domiciliaire d’insecticide à effet rémanent, le
traitement préventif intermittent des femmes enceintes, le recours aux
antipaludiques, la prise en charge et le traitement efficaces des cas ».