La Nation Bénin...
Moments
de sanctification et de renouvellement de la foi en Jésus-Christ, la Semaine
sainte est, selon le père Hubert Kèdowidé, directeur diocésain de la
communication de l’Archidiocèse de Cotonou et curé de la paroisse Bon pasteur
de Cotonou, un moment de résurrection et de nouveau départ dans l’espérance
pour le chrétien. Dans cet entretien, il explique les fondements et
implications de la Semaine sainte et prodigue des conseils.
La Nation : Les chrétiens catholiques sont entrés depuis quelques jours dans la Semaine sainte pour commémorer la passion du Christ. Quel est le sens et la portée spirituelle de cette semaine ?
Père
Hubert Kèdowidé : La Semaine sainte, c’est la semaine de sanctification au
cours de laquelle, nous voyons, en concentré, tout le développement de notre
foi en l’Eglise catholique à travers le Christ qui est mort et ressuscité pour
nous. Sa résurrection nous donne accès à la vie. Pendant la Semaine sainte qui
conclut le temps de carême, nous revisitons tous les moments forts de notre foi
à savoir, le jeudi saint, le vendredi saint et la nuit du samedi au dimanche.
Habituellement, le jeudi matin, nous faisons ce qu’on appelle la messe
chrismale mais pour des raisons pastorales et pour permettre à tous les prêtres
d’aller faire leur travail sur leur territoire pastoral, l’Eglise a dû ramener
la messe chrismale au mercredi saint. Au cours de cette messe chrismale, il y a
deux évènements importants. Le premier élément, c’est la bénédiction des huiles
saintes qui sont au nombre de trois à savoir l’huile des catéchumènes, l’huile
des malades et le saint crème. L’huile des catéchumènes sert à prédisposer les
catéchumènes à la foi et à l’écoute de la parole de Dieu ; l’huile des malades
est servie pour guérir les malades, l’âme et le corps et pour accompagner des
malades à la rencontre du Christ si éventuellement, ils étaient partis pour
l’éternité. Enfin, le saint crème est l’auteur de la grâce de la vie
chrétienne, c’est-à-dire que c’est ce saint crème qu’on utilise au baptême, à
la confirmation. C’est ce saint crème que les prêtres reçoivent dans la main
pour être ordonnés et les évêques sur la tête pour être consacrés. C’est
également avec le saint crème qu’on fait la consécration des églises et des
vases sacrés. Le deuxième élément qui est fait au cours de la messe chrismale,
c’est le renouvellement des engagements sacerdotaux, c’est-à-dire les vœux de
célibat, de pauvreté et d’obéissance. Chaque année, les prêtres renouvellent
ces vœux à l’évêque; et l’évêque lui-même avec tout le peuple de Dieu
renouvellent leur fidélité au Christ.
Le jeudi saint, c’est la sainte cène. Il n’y a pas de messe dans la journée. Du jeudi saint, on peut dégager trois éléments. Le premier élément fondamental, c’est l’humilité. Jésus s’abaisse pour laver les pieds des disciples. Ceci pour nous enseigner que si l’on veut être grand, il faut se faire petit. C’est ça être ministre du Christ et être au service des autres. Pour être au service des autres, il faut se faire petit. Le deuxième élément, c’est l’institution eucharistique. Jésus nous a donné la nourriture de la vie. Celui qui mangera de ce pain vivra pour toujours. Vous savez que c’est par la nourriture que le péché est entré dans le monde. En mangeant la nourriture au cœur du jardin, Adam et Eve ont voulu dépasser Dieu lui-même en prenant sa place et ont perdu les repères. Dieu, à son tour, se fait nourriture en naissant dans la mangeoire et au sommet de son honneur, il nous lègue l’Eucharistie qui est la nourriture de la vie. Le troisième élément est de perpétuer cette nourriture. C’est la fête du sacerdoce. Le vendredi saint, c’est le sommet de l’amour, le grand chemin de la croix et la célébration de la passion pour nous faire revivre toutes les misères endurées par le Christ dans ce monde. Quand nous vivons la passion, nous touchons du doigt tout ce que l’homme peut endurer dans sa vie personnelle, professionnelle, conjugale à savoir : la trahison d’un ami, la jalousie, la médisance, la calomnie, les coups bas. En vivant la passion, c’est chacun de nous qui actualise ses blessures, ses souffrances et qui regarde Jésus comme le sauveur qui est venu nous racheter. Et puis après, nous vivons dans l’espérance du silence du samedi matin avec Marie. Le samedi soir au cours de la messe pascale, nous allons crier notre joie à la résurrection du Christ qui est victorieux du péché et de la mort.
Que
vit-on pendant cette nuit pascale ?
On peut faire observer trois éléments. Le premier élément, c’est la lumière. C’est le cierge qu’on nous donne à la fin des rites du baptême. On commence par la lumière pour l’entrée pascale. Cette lumière est le symbole de l’amour infini, de l’éternité, du partage sans privation. D’une seule bougie, on allume toutes les bougies. Quand on donne la lumière à l’autre, il la reçoit mais cette lumière ne diminue pas. Ainsi, lorsqu’on donne l’amour, la bonté, la générosité, cela ne diminue en rien nos richesses et valeurs. C’est cela la Pâque, un passage de la mort à la vie, du désespoir à l’espérance. Ce que nous faisons au cœur de la nuit signifie que Dieu éclaire nos nuits respectives et nous sort de nos obscurités. Le deuxième élément, c’est la parole de Dieu. Nous lisons au moins cinq lectures ce jour-là. Ces lectures parlent de la création jusqu’à la rédemption et nous revisitons tout le cheminement que Dieu a accompli avec nous. Le péché est un corps étranger qui est venu perturber notre quiétude et notre bien-être mais le Seigneur ne nous a pas abandonnés. Le troisième élément est la présence de l’eau. Le prêtre bénit cette eau qui est source de vie et cela sert à nous asperger. De cette nuit, on embrasse, au petit matin, un jour nouveau, une vie nouvelle, un nouveau départ, un nouveau commencement. Rien n’est fini pour le chrétien, tout renaît.
Comment
le chrétien doit-il se comporter, même au-delà de cette Semaine sainte ?
Il
faut toujours vivre dans l’humilité. Le Christ n’a pas gardé son autorité
divine. Il s’est abaissé, il a accepté de s’associer aux pécheurs pour les
racheter. C’est en allant à la rencontre des autres sans créer de barrières
qu’on est capable de vivre avec les autres et de les amener au Christ. Nous
sommes aussi des fils de la lumière et non des ténèbres. Il faut que nous
vivions dans la lumière et en vivant dans la lumière, nous vivrions dans la
vérité et le bien.
Quel message avez-vous pour ceux qui traversent des situations délicates en cette période de grâce ?
Même
si l’on ne croit pas en Dieu, la résurrection du Christ est un motif d’honneur.
Quelle que soit la religion, si l’on se convainc que rien n’est fini, même au
cœur de la déchéance la plus totale, on a de l’espérance. Il est important pour
chaque personne de vivre dans l’espérance et dans la persévérance. Dans la vie
du chrétien, il ne doit jamais y avoir de démission parce qu’on vit dans la
souffrance, dans l’échec. L’échec est un succès différé et on doit être
toujours en attitude de résurrection. On n’a pas besoin de suivre le Christ
pour être convaincu de ça. On peut souhaiter à toutes les Béninoises et à tous
les Béninois d’être toujours en instance de résurrection. Au cœur du désespoir,
il n’y a pas de finition. Nous sommes en instance de résurrection¦