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2e congrès de la Société béninoise de pneumologie : « Nous allons revoir nos connaissances pour une meilleure prise en charge des patients », dixit Gildas Agodokpessi

Santé
Par   Paul AMOUSSOU, le 03 mai 2022 à 11h47
Placé sous le thème « Asthme et autres maladies respiratoires chroniques en temps de Covid-19 », la Société béninoise de pneumologie (Sobep) organise les 6 et 7 mai prochains son 2e congrès. A travers la présente interview, Gildas Agodokpessi, professeur titulaire de pneumologie et chef service de la clinique universitaire de pneumologie au Centre national hospitalier et universitaire de pneumo-phtisiologie de Cotonou aborde le contexte de ses assises et leurs avantages pour la santé des populations. La Nation : Parlez-nous de la Société béninoise de pneumologie ? Gildas Agodokpessi : C’est un creuset autour duquel, tous les praticiens, les médecins, qu’ils soient spécialistes ou non des maladies respiratoires, se retrouvent pour partager les actualités scientifiques de leurs domaines. C’est une société destinée à la formation continue de ses membres et de la communauté médicale. C’est aussi une société purement scientifique à but non lucratif qui intervient dans le domaine de l’amélioration des connaissances pour une meilleure prise en charge des patients. La société tient bientôt son 2e congrès. En quoi consiste-t-il ? Après son premier congrès qui remonte à 2013, la Société béninoise de pneumologie va tenir les 6 et 7 mai au palais des congrès de Cotonou, son deuxième congrès dont le thème principal est : « Asthme et autres maladies respiratoires chroniques en temps de Covid-19 », avec notamment des sous-thèmes, que ce soit l’asthme de l’enfant, de l’adulte, les broncho-pneumopathies à Covid et le syndrome d’apnées du sommeil. La pandémie de Covid qui a frappé le monde entier est due à un virus appelé Covid-19 qui a un tropisme essentiellement respiratoire c’est-à-dire que lorsqu’on prend dix patients atteints du Covid-19, huit patients ont des manifestations essentiellement respiratoires. Et donc, c’est une maladie qui affecte les poumons principalement et tous les autres organes accessoirement, avec lesquels le poumon arrive à maintenir la fonction vitale de l’homme. Après cette pandémie, il était important que les praticiens se retrouvent et essaient de réfléchir. Car comme vous le savez, c’était la première fois que nous découvrions cette maladie qui n’était pas connue des praticiens avec ses manifestations ontologiques. Il était important que toute la communauté scientifique se réunisse autour de ce thème pour mieux en savoir davantage. Nous avons voulu coupler ce congrès avec la Journée mondiale de l’asthme. Comme vous le savez, l’asthme est aussi une maladie respiratoire avec un enjeu important de santé publique de par le nombre de personnes atteintes mais aussi de par ses répercussions socioéconomiques et sanitaires. Et donc, la communauté internationale célèbre le 1er mardi du mois de mai la Journée mondiale de l’asthme. Nous profitons également de ce congrès pour sensibiliser davantage la population de notre pays et surtout les patients asthmatiques sur les moyens d’améliorer leur prise en charge. Pourquoi avoir associé le Covid-19 au thème du congrès ? Comme je vous le disais, l’asthme est essentiellement une maladie des poumons. Le Covid-19 est également une maladie qui attaque les poumons. Ces deux affections ont en commun cette partie de l’organisme et nous avons observé également que le Covid-19 pourrait aggraver la maladie asthmatique comme il pourrait, même en étant guéri, laisser des séquelles assez importantes au niveau des poumons. Il est important de revoir tous ces aspects ; et nos différentes équipes ont réalisé des travaux dans leurs unités, lesquels seront partagés. Ensemble, nous allons à partir des leçons apprises, pouvoir élaborer des procédures opératoires pour mieux prendre en charge les patients. Quelle distinction faire entre l’asthme de l’enfant et celui de l’adulte ? L’asthme est une maladie assez multifactorielle. C’est une maladie qui atteint préférentiellement l’enfant mais aussi l’adulte en des proportions assez variables. Mais il faut dire que ce soit chez l’enfant ou chez l’adulte, cette maladie ne se présente pas de la même façon et son traitement ainsi que sa conduite ne sont pas les mêmes. Il est important que nous discutions de cette particularité pour mieux sensibiliser nos collègues praticiens qui sont amenés à prendre en charge aussi bien les enfants que les adultes. Qu’en est-il de la pneumopathie à Covid-19 ? La pneumopathie à Covid-19 est une problématique un peu particulière. Quand on parle de pneumopathie, c’est le fait que le poumon ou le système pulmonaire soit atteint d’une maladie. Maintenant, quand on parle de pneumopathie à Covid-19, c’est l’atteinte pathologique du poumon. Cette atteinte comporte plusieurs aspects au regard de ce que nous observons dans la littérature scientifique mais aussi de ce que nous observons chez nous dans nos hôpitaux. Il y a la phase aiguë et à cette phase aiguë, le patient développe des signes de la maladie. En fonction d’un certain nombre d’éléments qui sont des susceptibilités qu’on appelle des comorbidités, certains vont faire une manifestation bruyante de la maladie et vont se retrouver à l’hôpital. Par contre, il y aura d’autres qui n’auront aucune manifestation. Dans tous les cas, au bout de dix ou quinze jours, le virus va mourir mais son passage va entrainer des séquelles, lesquelles sont fonction d’un certain nombre de susceptibilités. Qu’en est-il du syndrome des apnées du sommeil ? Voilà encore une autre pathologie qui concerne toujours le système respiratoire et qui est une maladie méconnue sous nos cieux parce que les symptômes de la maladie sont des symptômes parfois insidieux. D’autres sont bien connus mais banalisés dont le ronflement. Quand quelqu’un dort et qu’il ronfle, cela apparaît comme un phénomène banal mais derrière ce ronflement, il peut y avoir des maladies. C’est le cas de l’apnée du sommeil. Et donc, ce ronflement qui correspond à une obstruction des voies respiratoires peut aller jusqu’à l’oblitération complète de la voie respiratoire. C’est pour ça qu’on parle d’apnées du sommeil qui sont des arrêts de la respiration, des pauses respiratoires qui feront que pendant que le sujet dort, il n’aura pas une bonne qualité de sommeil. S’il n’a pas une bonne qualité de sommeil, cela aura des répercussions sur son organisme entier et cela va se manifester par des somnolences dures et excessives. C’est une maladie qui a beaucoup de complications aussi bien sur le cœur, les vaisseaux que sur les hormones. C’est un véritable tueur silencieux. C’est aussi une pathologie qui est méconnue sous nos cieux et dont le diagnostic nécessite des explorations c’est-à-dire des examens qui sont d’un coût souvent élevé et pas accessible dans nos milieux. La prise en charge est assez onéreuse chez le peu de patients chez qui on arrive à dépister cette pathologie. Il est important que nous réfléchissions autour de ce thème pour toujours mieux sensibiliser les collègues médecins pour qu’on puisse mieux prendre en charge les patients et faire des propositions concrètes aux autorités. Il y a certainement d’autres pneumopathies chroniques sur lesquelles vous allez aussi vous pencher. Il y a d’autres pneumopathies chroniques qui seront abordées au cours de ce congrès. Quand on parle de pathologies respiratoires, il y a les pathologies respiratoires qui sont transmissibles et les pathologies respiratoires non transmissibles. Dans les pathologies respiratoires transmissibles, en termes d’importance, on voit la tuberculose qui est une maladie dont le germe a un tropisme essentiellement pulmonaire. Huit fois sur dix, c’est une atteinte des poumons. On parle de pneumonie qui est la première cause de mortalité des enfants. La pneumonie tue un enfant toutes les trois minutes dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la Santé. Il y a aussi les autres pathologies infectieuses qui sont dues à d’autres germes dans l’environnement. Quand on rentre dans le lot des pathologies non transmissibles, nous allons parler de l’asthme, des apnées du sommeil, des broncho -pneumopathies chroniques c’est-à-dire des maladies respiratoires que l’on contracte lorsqu’on vit dans un environnement insalubre. Ce sont des pathologies d’accumulation parce que nous accumulons des substances nocives. Nous allons parler également des infections qui peuvent atteindre le pharynx. Je rappelle que la Société béninoise de pneumologie n’organise pas que des congrès, mais aussi des enseignements post-universitaires en partenariat avec l’Université d’Abomey-Calavi. Quels sont les avantages de vos assises pour la santé des populations béninoises ? La première chose est que la Société béninoise de pneumologie vise essentiellement la formation continue du personnel aussi bien médical que paramédical. Par rapport à ces affections respiratoires dont nous allons parler, les praticiens auront plus de connaissances et pourront bien prendre en charge les patients. La deuxième chose est qu’ils pourront mieux informer les patients. Et comme le dit l’adage : « Un patient bien informé est un patient à moitié guéri ». La deuxième moitié de la deuxième journée sera consacrée à une sensibilisation des patients asthmatiques. Dans ce cadre, l’Association des patients asthmatiques du Bénin va organiser une caravane à travers la ville. Ensuite, elle va nous rejoindre pour discuter des difficultés qu’ils ont afin de trouver des solutions quant à cette pathologie. A terme, les populations porteuses seront davantage mieux outillées afin de mieux faire face à ces pathologies. Aussi, nous invitons tous nos collègues praticiens, les médecins spécialistes ou non concernés par la prise en charge des maladies respiratoires d’une façon globale à se joindre à nous au palais des congrès de Cotonou les 6 et 7 mai prochains pour qu’ensemble, nous mettions à jour nos connaissances. Les différentes équipes de chercheurs viendront avec des thématiques sur lesquelles, ils ont des réponses et nous allons discuter sur les aspects les plus consensuels pour améliorer la prise en charge des patients. Les autres aspects vont inspirer d’autres équipes de chercheurs qui vont retourner à leurs lieux de travail et nous espérons que dans les années à venir, nous aurons encore davantage de thématiques autour desquelles, nous allons pouvoir discuter et accorder nos violons. Surtout, nous allons sortir des procédures opératoires standardisées pour que chaque praticien, de là où il se trouve, puisse, par rapport à ces pathologies respiratoires, pouvoir bien informer les patients, les diagnostiquer et leur donner le bon traitement.