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En pleine transformation, le port de Cotonou veut concilier croissance et exemplarité écologique. Entre ambitions logistiques et gestion des impacts, le Rapport environnemental 2023–2024 dévoile une plateforme qui mise sur la performance durable pour rester compétitive.
Modernisation accélérée, durcissement des normes internationales et surveillance environnementale renforcée...Le Port autonome de Cotonou (Pac), certifié Iso 14001, Iso 9001, Iso 45001 et deuxième port africain labellisé EcoPorts depuis 2022, consolide un positionnement où la performance écologique devient un levier stratégique autant qu’un impératif réglementaire. Comme en témoigne son Rapport environnemental 2023–2024, il s’appuie sur son Système de management environnemental pour suivre en continu la qualité de l’air, de l’eau, du sol ainsi que les nuisances sonores et la gestion des déchets.
L’activité portuaire reste soutenue. Le volume de marchandises traitées a progressé de 9,57 millions de tonnes en 2023 à 9,67 millions de tonnes en 2024, pour 811 puis 760 escales. Dans le même temps, douze projets structurants redessinent la plateforme, de l’extension du bassin à la construction du Terminal 5, en passant par une zone logistique d’environ 50 hectares et un second poste à quai pour les hydrocarbures, destinés à accueillir davantage de navires de grande capacité.
Les discussions tenues lors de la première édition des «Rencontres Transport – Logistique Cotonou », les 27 et 28 novembre, ont rappelé le poids croissant des réglementations internationales. Des intervenants ont notamment souligné que les normes européennes, telles que le Macf (Mécanisme d’ajustement Carbone aux frontières) ou l’Eudr (Règlement sur la déforestation), deviennent des passages obligés : certains groupes européens mobilisent déjà «une centaine de personnes » pour assurer leur conformité, faute de quoi ils risquent de perdre l'accès au marché.
Pressions sur le milieu
Pour l’autorité portuaire, « l’ambition doit toujours dépasser la contrainte ». Depuis novembre 2023, dix-sept capteurs et sept jauges mesurent la qualité de l’air en continu. Les premières données alertent sur des concentrations élevées de particules fines, de dioxyde d’azote et surtout de dioxyde de soufre, notamment au dépôt de soufre en mer, où des pics extrêmes sont enregistrés lors des opérations de manutention. Le rapport confirme le fort impact des opérations de vracs, de la circulation dense de camions et des combustions marines.
La qualité de l’eau du bassin fait également l’objet d’un suivi rapproché. Si la salinité demeure stable, la turbidité augmente sensiblement près du Terminal 5 et des zones d’excavation, en raison de la remise en suspension des sédiments et des travaux en cours.
La gestion des déchets montre, pour sa part, une amélioration avec 661,87 tonnes de déchets solides collectés en 2023 et 699,74 tonnes en 2024, acheminés vers les centres autorisés.
Comme incidents environnementaux majeurs, la plateforme portuaire a enregistré un déversement ayant provoqué la pollution du bassin portuaire en 2023 contre deux en 2024, provenant d’une même source : les pipelines d’un ancien dépôt de fuel.
Renforcer la gouvernance
Au-delà des indicateurs techniques, le port renforce sa gouvernance environnementale en collaboration avec la ville de Cotonou. Le directeur général du Port autonome de Cotonou, Bart Van Eenoo, évoque une relation « de jumeaux siamois » entre ville et port, nécessitant une planification intégrée jusqu’à l’horizon 2060 et même 2100. La réflexion porte notamment sur la mobilité des salariés portuaires, la décarbonation des trajets domicile-travail, la gestion des flux pour éviter l’asphyxie de la plateforme, la surveillance des espèces invasives.
La fermeture prolongée de la frontière nigérienne a entraîné un stockage exceptionnel de soufre, renforçant les défis de gestion des impacts. Une meilleure prise en charge de cette matière est recommandée ainsi qu’un renforcement des inspections sur les zones de vrac et des campagnes de sensibilisation des acteurs.
Il est projeté la mise en place d’un tri sélectif structuré, d’une filière locale de recyclage et d’un laboratoire interne d’analyse environnementale. Les déchets liquides, issus des fosses septiques, ont atteint 3 600 m³ en 2023, intégralement traités sur des sites agréés par l’Etat.
Moderniser, se conformer aux exigences internationales et protéger le milieu tout en absorbant une croissance continue, tel est l’enjeu. Le port de Cotonou avance dans un équilibre de plus en plus complexe, mais où la performance environnementale apparaît désormais comme un critère central de sa compétitivité future.
Les principaux défis environnementaux restent la gestion du soufre, les émissions de poussières liées au déchargement du vrac, le respect des consignes de sécurité et l’assainissement des entrepôts