La Nation Bénin...
Elu en mai dernier, Sidi Ould Tah prend les rênes du
Groupe de la Banque africaine de développement (Bad) dès le 1er septembre.
Succédant à Akinwumi Adesina, son mandat à la tête de cette institution clé
s’ouvre dans un contexte de lourds défis économiques, mais demeure porteur
d’espoirs de transformation structurelle pour le continent.
Le Mauritanien Sidi Ould Tah succède à Akinwumi Adesina
et prendra ses fonctions, lundi 1er septembre prochain, pour un mandat de cinq
ans. Son prédécesseur a marqué, au cours des dix dernières années, la Banque
africaine de développement (Bad), institution clé dans le développement du
continent, par un leadership salué internationalement, consolidant la solidité
financière de la banque, augmentant les financements climatiques et renforçant
le rôle de l’institution dans la sécurité alimentaire. Le défi pour Sidi Ould
Tah sera de maintenir cette dynamique tout en apportant un souffle nouveau.
Son parcours impressionnant inspire confiance. Avec plus
de 35 années d’expérience dans les finances africaines et internationales, il a
convaincu la majorité des 81 pays membres de la Bad (54 africains et 27
extérieurs). Ancien ministre de l’Economie et des Finances de Mauritanie, il a
dirigé pendant dix ans la Banque arabe pour le développement économique en
Afrique (Badea), qu’il a profondément transformée. Sous sa houlette, la Badea a
quadruplé son bilan, obtenu une notation AAA et figuré parmi les institutions
les mieux notées du continent. Dès son élection, Sidi Ould Tah a déclaré : « Au
travail maintenant ! Je suis prêt », un ton direct en phase avec l’urgence des
défis.
Un continent sous pression
Le changement climatique, la fragilité de la sécurité
alimentaire, l’insuffisance des infrastructures, les tensions géopolitiques et
la réduction de l’aide internationale au développement mettent à rude épreuve
les efforts de développement. Le thème des Assemblées annuelles 2025 organisées
en mai dernier : «Tirer le meilleur parti du capital de l’Afrique pour
favoriser son développement », reflète les priorités du moment.
Les objectifs stratégiques «High 5» de la Banque :
éclairer l’Afrique, nourrir l’Afrique, industrialiser l’Afrique, intégrer
l’Afrique et améliorer la qualité de vie des Africains, devront être
approfondis pour accélérer la mise en œuvre du deuxième plan décennal de
l’Agenda 2063 de l’Union africaine. Le neuvième président de la Bad devra
également faire du capital humain un levier central, afin que le dividende
démographique devienne un atout et non un handicap, comme l’a souligné Koffi
N’Guessan, ministre ivoirien de la Formation professionnelle: « La jeunesse
peut devenir un handicap si l’on ne met pas en place des politiques robustes de
formation, de la maternelle à l’université ».
La gouvernance financière constitue un autre enjeu
majeur. Dans un contexte de raréfaction des financements concessionnels,
accentué par le retrait annoncé des États-Unis du Fonds africain de
développement (Fad), la mobilisation des ressources internes, la lutte contre
les flux illicites, la structuration de projets bancables et l’engagement du
secteur privé sont impératifs. Sidi Ould Tah devra consolider cette dynamique de
responsabilité partagée et renforcer la gouvernance de la Banque pour la rendre
plus agile, comme le souhaitent de nombreux Etats membres et partenaires
internationaux.
Enjeux climatique et alimentaire
L’Afrique dispose de 65 % des terres arables non
cultivées dans le monde, mais importe chaque année 75 milliards de dollars de
denrées alimentaires, un paradoxe frappant. Le nouveau président hérite d’une
institution déjà fortement engagée dans ce domaine. En 2022, la Facilité
africaine de production alimentaire d’urgence a mobilisé 1,5 milliard de
dollars pour soutenir 34 pays.
Pour Ousseynou Guène, chef de la division Eau et
assainissement à la Bad, l’Afrique peine encore à capter les financements
climatiques, déplorant l’insuffisance des études et le retard dans les délais
de consommation des ressources. « Les pays les plus proches d’atteindre les
objectifs intègrent le volet des investissements sans attendre d’appui.
Malheureusement, on compte sur les bailleurs pour les préparations en amont »,
a-t-il fait constater lors des dernières assemblées générales.
Il est attendu du nouveau président qu’il renforce la
préparation et la bancabilité des projets, multiplie les partenariats
stratégiques, notamment avec le secteur privé, et réinvente les mécanismes de
financement, y compris les droits de tirage spéciaux du Fonds monétaire
international (Fmi). « Le temps est venu pour l’Afrique de prendre les devants
à travers une introspection afin de générer ses propres ressources », souligne
Vincent O. Nmehielle, secrétaire général du Groupe de la Bad.
Le mandat de Sidi Ould Tah sera également jugé à l’aune de sa capacité à faire de la jeunesse africaine un pilier du développement et à accélérer la transformation numérique et l’intégration régionale.
Sidi Ould Tah