La Nation Bénin...
La coalition internationale Tournons la Page (Tlp) a
initié, samedi 23 août à Cotonou, une conférence-débat sur un thème « La
responsabilité du cadre béninois dans l’échec de développement de son pays ».
L’événement, marqué par la présence d’un public diversifié, a été animé par
l’ancien ministre Alain Adihou, en qualité de panéliste, avec une contribution
de l’analyste politique Joël Atayi-Guédègbé.
Au cours de la conférence-débat sur le thème « La responsabilité du cadre béninois dans l’échec de développement de son pays », l’ancien ministre sous le président Mathieu Kérékou, Alain Adihou, a choisi d’élargir la réflexion à l’échelle continentale avant de centrer son analyse sur le cas spécifique du Bénin. Il a rappelé que si les facteurs exogènes, héritage colonial, mondialisation néolibérale, déséquilibres structurels pèsent indéniablement sur le destin de l'Afrique, ils ne sauraient à eux seuls justifier l’échec de son développement. Pour l’ancien ministre, la part de responsabilité des élites africaines, et singulièrement béninoises, est non négligeable. « Il est des sujets qui dérangent, des vérités que l’on préfère taire, mais les silences deviennent des complicités », a-t-il lancé, invitant les cadres et intellectuels béninois à rompre avec une certaine passivité. S’appuyant sur une démarche historique et sociologique, Alain Adihou a mis en lumière plusieurs dimensions de cette responsabilité notamment l’héritage colonial mal transformé, le déficit d’expertise technique, les compromissions éthiques, l’absence de leadership politique et technocratique. Il a notamment dénoncé la tentation récurrente des cadres à privilégier le confort et la proximité du pouvoir plutôt que l’intérêt général, rejoignant ainsi les mises en garde anciennes de penseurs tels que Joseph Ki-Zerbo ou Frantz Fanon.
Joël Atayi-Guédègbé, pour sa part, a enrichi le débat en insistant sur la nécessité d’un renouveau éthique et citoyen. Selon lui, l’élite béninoise doit cesser de se positionner comme simple exécutante d’un système bureaucratique, pour redevenir force critique et vigie démocratique. Au terme des échanges, un constat s’impose. Plus de soixante ans après les indépendances, le Bénin peine toujours à transformer ses promesses de développement en réalités tangibles pour sa population. Si les contraintes extérieures existent, l’échec relève aussi, et peut-être surtout, d’une responsabilité interne que nul ne peut éluder.
Refonder l’alliance
Dans un plaidoyer vibrant, Alain Adihou a ainsi appelé à
« refonder l’alliance entre le savoir et le pouvoir », en formant des cadres
éthiques autant que techniques, capables de dire non lorsque l’intérêt
collectif est menacé. Pour lui, l’avenir du pays ne dépendra pas d’aides
extérieures ni de solutions imposées d’en haut, mais d’une élite réformée,
consciente de sa mission et résolument tournée vers le bien commun. En mettant
les cadres béninois face à leurs responsabilités, cette conférence-débat aura
eu le mérite d’ouvrir un espace de lucidité et de vérité. Reste désormais à
savoir si ce sursaut moral et civique trouvera un écho durable dans les
pratiques quotidiennes de ceux qui détiennent les clés du développement
national.
L'élite béninoise doit cesser de se positionner comme simple exécutante d’un système bureaucratique, pour redevenir force critique et vigie démocratique